Cette, année, pour les salariés de Total, le Père Noël n’a pas une barbe blanche, mais une moustache en pétard. Le PDG du groupe, Christophe de Margerie, a accordé à ses troupes un accord salarial 2012 qui va faire saliver chez ses pairs du CAC 40. La masse salariale augmentera de 3,4 % et chacun touchera une prime de 1200 euros. Etre le champion français des profits procure des marges de manœuvre. La difficulté consiste à bien placer le curseur pour que la juste répartition des profits ne se transforme pas en puits sans fond.
Les 3,4% négociés, mardi 20 décembre, entre la direction et les syndicats n’ont l’air de rien, mais le chiffre représente près de 40% de plus que ce que s’apprêtent à verser les grandes entreprises françaises, selon une étude publiée en octobre par le cabinet de ressources humaines Mercer. Quand on sait que l’inflation devrait atteindre 1,7% et que 55% des Français anticipent une baisse de leur pouvoir d’achat, selon le baromètre Viavoice-BPCE, on se dit qu’il fait bon être chez Total.
Le pétrolier s’est donc payé en plus le luxe d’annoncer le versement d’une prime de 1200 euros à chacun des 17000 salariés des branches raffinage et exploration-production. Une sorte de pied de nez à la prime Sarkozy sur les dividendes. Ceux-ci n’ayant pas augmenté chez Total en 2011, le groupe n’était pas éligible à cette mesure. Verser malgré tout cette enveloppe, dont le montant dépasse très largement ce qu’ont versé en moyenne les entreprises obligées de le faire, revient à dire aux pouvoirs publics : «Gardez vos conseils de générosité pour vous, les entreprises savent faire de la redistribution par elles-mêmes quand elles en ont la possibilité!»
Les grincheux diront que cela revient à acheter la paix sociale. Il est vrai que, mis à part quelques bémols de circonstance, les syndicats ne se sont pas fait prier pour parapher l’accord, CGT en tête.
Néanmoins, Total aurait pu difficilement faire moins. Les bénéfices de 2011, même s’ils n’atteindront pas le record historique toutes catégories de 2008, devraient avoisiner les 12 milliards d’euros.
Ces montants sont tellement disproportionnés par rapport au reste de l’économie française, qu’ils ouvrent la porte à toutes les démagogies, à toutes les convoitises et à toutes les jalousies. Mais il ne faut pas oublier que les investissements sont à peu près du même ordre de grandeur que les bénéfices. Total peut plus que les autres, mais ne peut pas tout.